Retour à la page d'accueil

 

Où va le Cameroun? : Lettre ouverte des Francs Maçons au président Paul Biya

Africe Presse/ Mardi 14 Avril 2009

Écoutez cette jeunesse qui ne dit mot, qui est face à l’épreuve des faits, cette jeunesse en perte de repères, et à qui l’on brandit des chimères comme valeurs.

Excellence monsieur le président,
Nous Vous saluons avec tout le respect dû à un grand dignitaire, avec Beauté, Révérence Chevaleresque, Ordre, Sagesse, Opulence, Rectitude, Loyauté, Sincérité!

Excellence Monsieur le président de la République,
Nous, Francs-Maçons de la diaspora nord américaine, avons décidé de vous adresser cette planche afin de vous faire part de notre profonde préoccupation sur les problèmes de l’heure au Cameroun. Excellence Monsieur le Président,
Manifestement vous voulez remettre le Cameroun sur pied et l’engager dans la voie du futur. Cela est louable et plaît à une grande majorité d’entres nous. Puisque vous avez été élu à la Magistrature Suprême pour ce travail, permettez-nous de vous en féliciter et de vous souhaiter bonne chance, car il vous en faudra pour combattre nos vieux démons, nos vieilles habitudes dans un monde en plein changement.
Nous faisons partie de cette élite de Francs-Maçons qui pensent que notre pays mérite beaucoup mieux que ce qu’il a connu depuis près de 50 ans. Il nous semble utile de vous dire qu’il faudrait préparer au mieux notre pays pour le futur proche qui pourrait être assez chahuté et chaotique avec à la fois, la fin programmée des énergies fossiles, les problèmes d’environnement, de pauvreté et d’inégalité sociale, qui se poseront avec acuité.

Le bilan au moment où nous, Francs-Maçons Camerounais de la diaspora et surtout des États-Unis d’Amérique du Nord, vous écrivons cette lettre, est alarmant. Jamais, jamais le Cameroun, notre pays, n’a été aussi noirci sur l’échiquier international, jamais les Camerounais n’ont été aussi vilipendés un peu partout dans le monde, à cause de la corruption, du favoritisme, des détournements de deniers publics, de la pauvreté, du chômage, du mismanagement des affaires publiques, etc. Ce bilan se traduit tant par l’effacement du Cameroun sur la scène continentale que mondiale, que par la baisse de son influence dans ces mêmes sphères.

Excellence Monsieur le Président,
Face à toutes les solutions que vous et votre gouvernement proposez, que nous ne jugeons pas toutes autant mauvaises, bien au contraire, nous entendons vous encourager car ce sont des actions républicaines et libres. Mais il est certain que plusieurs de vos plus proches collaborateurs n’écoutent pas le message du Cameroun profond, à votre opposé, et vous donnent une image biaisée des réalités nationales. Les évènements de ces jours derniers en sont les plus probants témoins.
Écoutez Monsieur le Président, le langage des Camerounais, leurs cris, leurs douleurs, leurs souffrances, mais surtout, essuyez les larmes de cette jeunesse Camerounaise qui, comme toutes les jeunesses de pays nobles, a droit au rêve, à la saine émulation, à l’espoir, à la vision d’un futur désiré et réalisable.
Écoutez Monsieur le Président cette jeunesse qui ne dit mot mais qui est face à l’épreuve des faits, cette jeunesse en perte de repères, et à qui l’on brandit des chimères comme valeurs.
Nous le déclarons solennellement ici, il n’y a aucune volonté de discrimination contre votre gouvernement, nous le respectons comme nous le faisons pour celui des États-Unis d’Amérique, notre nation d’accueil et d’adoption. Nous connaissons leur histoire, et celle des valeureux frères qui ont bâti les fondements de cette valeureuse nation.

Monsieur le Président,
Comprenons parfaitement les paroles du Président Abraham Lincoln lorsqu’il disait parlant de sa propre patrie : ” Cette nation est à demi libre et à demi esclave “. Ces mêmes paroles, cette même pensée, nous pouvons l’appliquer à notre pays, notre continent, apparemment libres mais esclaves de la réalité moderne. Un peu plus tard, le président Lincoln écrivît ceci en 1862 : “En donnant la liberté à l’esclave nous avions garanti la liberté de l’homme libre, tout aussi honorables dans ce que nous donnons que dans ce que nous préservons”. Soyez honorable et fier dans ce que vous donnez, cela vous garantira une sortie honorable le moment venu, et c’est l’image que l’Histoire du pays et du monde retiendra de vous.

Monsieur le Président,
Vous semblez découvrir ce que nous n’avons cessé de dénoncer : après des années de progrès constants, de hausse du niveau de formation des jeunes, le système éducatif peine encore à remédier à l’échec scolaire de milliers de jeunes en difficulté. Mais cette crise est d’autant plus urgente à traiter qu’elle s’inscrit dans une société qui voit grandir les inégalités sociales dans tous les domaines, allant de la Sécurité Sociale à la Santé, en passant par l’Agriculture et les domaines de la Recherche et de la Protection de notre environnement. S’il y a des difficultés dans l’École, elles renvoient aussi, tout le monde le sait, à des difficultés vécues au quotidien hors de l’école par des milliers d’enfants et de jeunes. Non, tous les enfants n’ont pas les mêmes chances au départ, tous les jeunes n’ont pas les conditions de vie, de santé, d’équilibre qui leur permettent, sans accompagnement, d’accéder aux apprentissages, de se projeter dans l’avenir.
Aider efficacement les jeunes les plus en difficulté, former les enseignants pour cela, combattre les inégalités sociales et le danger que représenterait une jeunesse sans ambition, ouvrir un avenir positif pour tous les jeunes, rien de plus difficile, rien de plus compliqué sans doute, mais rien de plus indispensable pour les jeunes, pour nous, pour l’avenir du pays. C’est pourquoi l’État doit réussir à se transformer, c’est pourquoi cette jeunesse a droit à un futur comme dit plus haut, c’est pourquoi les Camerounais veulent encore penser et rêver que l’avenir sera radieux.

C’est ce défi là que doit relever votre gouvernement, parce qu’il est le seul à pouvoir le faire, pour tous, et pas seulement pour les plus favorisés ou les ” méritants “. C’est une question d’avenir, c’est un enjeu de démocratie. Le choc de la mondialisation qui constitue un processus inéluctable et irréversible sonne à nos portes.

À cet effet Monsieur le Président de la République,
Nous savons que vous aurez à cœur, en votre qualité de garant des institutions, de veiller au respect de leur équilibre et de préserver la spécificité de notre Assemblée Nationale afin qu’elle puisse continuer à remplir sa mission, avec la même efficacité, et déployer son savoir-faire de législateur en apportant un éclairage différent aux textes soumis à son examen. En outre, l’Assemblée Nationale se doit d’éclairer l’avenir des Camerounaises et des Camerounais : elle doit devenir un laboratoire d’idées en vue de l’action politique et des grands défis de demain.
À ces réformes vitales pour l’avenir de notre pays, l’Assemblée Nationale saura apporter sa contribution éclairée face à ce tournant décisif de notre pays. À ce sujet, gardons - nous de la démagogie et des idées à la mode. Cessons de vouloir toujours tout remettre à plat et contentons nous de remettre les choses debout. Un Frère qui vous connaît bien a déclaré que vous aviez beaucoup de disposition au Bonheur, à la Famille, à votre Pays et à la Jeunesse. Nous en sommes convaincus et n’en doutons pas, de ce que vous laissez paraître.

La Loi fondamentale de notre pays, la Constitution, vient d’être modifiée par l’Assemblée Nationale, garantissant ainsi une continuité de la vie de la Nation. Il conviendrait de même, de donner un contenu opérationnel aux autres instances nationales qui sont en léthargie depuis leur création (Sénat, Régions, etc.). L’ont- elles été pour la galerie ou pour le bien de la République? Ou encore pour satisfaire à des exigences exogènes de gouvernance? Ce sont autant d’éléments à même de vous fournir des bases de décision et de lecture franche de la situation du Cameroun, des instruments de méta stratégie pour une vision ontologique des problèmes de la nation. Ces institutions constituent des forums au sein desquels l’avenir de la Nation se joue et se prépare, une forme d’Athanor au sein duquel les idées se brassent et se mélangent.

Excellence Monsieur le Président,
Les Maçons de la diaspora Nord Américaine ainsi que de nombreux Frères du Cameroun, savent pouvoir compter sur vous, pour que vous laissiez aux générations du futur, l’image d’un homme de principes, de travail, de légalité, sachant appliquer les préceptes maçonniques dans la gestion des affaires de la Cité. L’homme camerounais est pacifique et travailleur, doté d’intelligence et de potentiel, dans un des environnements les plus riches d’Afrique. Mais pourquoi passe-t-il le plus clair de son temps à pleurer et à crier famine? Comment peut-on, comme on le dit si bien dans nos traditions, être assis au bord de la source et mourir de soif?

Excellence,
Cette planche qui vous est adressée ce jour, est la première d’une série à venir dans laquelle chaque thème de la vie de la Cité sera évoqué de manière spécifique, car à ce moment - là, nous mettrons à contribution tant les Frères de la Diaspora Maçonnique, que ceux vivant au Cameroun, spécialisés dans des domaines précis (Santé, Éducation, Environnement, Finances Publiques, Patronats, Industries, etc.).
Nos travaux se situent aujourd’hui au - delà des limites de la loge, c’est une Maçonnerie active et non passive qui se met au travail face aux défis de la mondialisation, des problèmes de la Cité et du pays. Nous entendons participer ouvertement désormais, dans tous les débats de la vie publique du Cameroun, car nous estimons être restés en marge dans un pays qui est le nôtre, que nous aimons et chérissons, et pour lequel nous avons fait vœux d’obéissance et de soumission aux Lois et aux Dirigeants.
Nous voulons, nous, continuer dans le monde profane, les travaux commencés dans nos Temples, virtuels ou réels, que nous considérons comme des Athanors, formes de chaudrons dans lesquels nos idées prennent corps, mûrissent, et devraient en toute légitimité, éclore dans le monde profane. Nous voulons cesser de nous voiler les yeux face aux tendances de l’heure, nous voulons cesser de porter des masques face aux souffrances humaines, de nous comporter comme des Profanes en Tabliers. Nous voulons apprendre à vivre en Maçons dignes de leurs Serments et de leurs engagements vis-à-vis de la Veuve et de l’Orphelin, en donnant un contenu opérationnel à notre Vie Maçonnique.

Oui, Excellence,
Nous assumons notre statut de Franc - Maçons, quelles que soient nos Obédiences, nous apprenons à utiliser de manière efficiente les Outils mis à notre disposition, à dégrossir, à polir et à tracer des plans, à créer des volumes, sans que la carrière ne devienne un lieu de vacarme. Nous apprenons à étudier les veines de la Pierre et à ajuster le Maillet et le Ciseau, pour que le Grand Œuvre nous survive, pour que nos Fils, Petits - Fils et Arrières Petits - Fils soient fiers de nous en regardant nos Tabliers élimés, nos Gants troués, nos mains écalées, et que le souvenir de notre passage en ce bas monde continue de survivre à travers la Chaîne d’Union Universelle.

Excellence Monsieur le Président de la République,
Telles sont les Idées à vous soumises, et telles sont de même les Règles que nous nous devons tous d’observer et, telles devraient aussi être les Lois.
Ayez Excellence Monsieur le Président de la République, la conscience qu’un jour, une fois votre mission terminée à la tête de la Nation, une fois rentré dans notre belle et grande forêt du Sud, là-bas dans votre Mvomeka’a natal, vous aurez des belles histoires à raconter à vos enfants et petits - enfants. Ce sera le plus grand moment de votre existence, un repos bien mérité parmi les siens, comme dans nos traditions bantous.

Excellence
Que Le Très Haut continue de guider vos pas afin que vous puissiez accomplir Votre Haute Mission.

Bro. Emmanuel M. Bityeki*

http://www.cameroun-online.com/actualite,actu-9763.html